Crédit photo Greenpeace France
Communiqué de presse en date du 19/03/2021
La commission spéciale a, dans la nuit du jeudi 18 mars, adopté la version du “délit d’écocide” proposée par le gouvernement, sourde aux revendications des membres de la Convention citoyenne pour le climat (CCC), des avertissements de l’association Wild Legal et des députés qui ont rappelé que la France se mettait ainsi à rebours des négociations en cours au niveau international et européen.
L’étude des articles 68 et 69 était un moment d’une importance majeure. En effet, un fossé s’est formé entre l’ambition originelle de la CCC de créer un véritable crime d’écocide au sommet de la pyramide des atteintes à l’environnement et ainsi de sanctionner les dommages qui portent atteinte à la sûreté et à l’habitabilité de nos territoires et, la proposition du gouvernement de créer un « délit d’écocide » qui ne cache rien d’autre qu’un délit de pollution (voir notre communiqué de presse “Ceci n'est pas un écocide” en date du 24 novembre 2020).
Alors que Wild Legal et les membres de la CCC ont à plusieurs reprises rencontré les ministères concernés et que notre association a été auditionnée par la Commission spéciale, alertant sur l’incohérence du texte soutenu vis à vis des négociations en cours au niveau international et européen, la ministre Barbara Pompili persévère.
Pour Guy Kulitza, membre de la Convention citoyenne pour le climat : “C'est une trahison de l'esprit et de la lettre de la proposition votée par la Convention Citoyenne et un reniement pur et simple de la parole présidentielle”
Comble de l’absurde, quelques minutes après avoir adopté le “délit d’écocide”, les membres de la Commission votent en faveur d’un amendement du député Erwan Balanant préconisant cette fois la réalisation d’un rapport sur l’action du gouvernement en faveur de la reconnaissance du crime d’écocide au niveau international. Le malaise était palpable au sein de la Commission spéciale.
Encore une fois, le gouvernement fonce tête baissée privilégiant une belle opération de communication à une avancée juridique effective, disqualifiant la France dans les négociations sur le crime d’écocide à l'international et au Parlement européen.
“Ce gouvernement est un véritable boulet pour la lutte contre la criminalité environnementale” selon Marine Calmet, présidente de l’association Wild Legal.
La bataille parlementaire ne fait que commencer
Sur les 34 amendements relatifs à l’écocide déposés, 7 d’entre eux reprenaient textuellement les propositions rédigées par la CCC et l’association Wild Legal.
Voir le dossier législatif rédigé par Wild Legal et la CCC
Fer de lance des soutiens aux propositions citoyennes, la députée Delphine Batho (Deux Sèvres), Matthieu Orphelin (Maine-et-Loire) et Gérard Leseul (Seine Maritime) ainsi que 10 autres députés socialistes défendent l’inscription du crime d’écocide dans le Code pénal. M. Leseul rappelait l’importance de « porter au plus haut la protection de l’environnement » car il ne « peut plus y avoir de demi-mesures en cas d’atteinte grave et intentionnelle à notre environnement ».
Pour Valérie Cabanes, juriste internationale et experte du crime d’écocide : “Avec cette proposition, le gouvernement envoie un message délétère selon lequel en droit français, détruire la Nature de manière grave et intentionnelle n'est pas un crime, mais uniquement un délit. C’est invraisemblable.”
Le groupe La France Insoumise pourrait également déposer ces amendements en précision de la séance publique à l’Assemblée nationale. La nuit dernière, Mathilde Panot (Val-de-Marne) a déclaré que l’article 68 était une “vraie régression”, que le gouvernement durcissait les critères pour une meilleure “protection des pollueurs”.
L’avenir des débats
Même au sein de la majorité présidentielle, la proposition du gouvernement ne fait pas l’unanimité. En effet, quatre députés LREM dont M. Girardin ont eux aussi déposé un amendement rectificatif visant à retirer le terme d’écocide dans l’article 68 de la loi Climat.
Le gouvernement pourrait donc bien voir se dresser contre lui de nombreux parlementaires, issus de ses rangs mais également de plusieurs groupes parlementaires de La France insoumise, aux Socialistes et jusqu’aux Républicains. De plus, le Sénat ne devrait pas réserver un meilleur sort à ce “délit d’écocide”.
Wild Legal appelle le gouvernement à renoncer à sa posture incohérente afin de ne pas aller à contre-courant des avancées internationales portées notamment par la Fondation Stop ecocide. Non content de manquer aux engagements envers la CCC, ce texte est une véritable trahison vis-à-vis des victimes d’écocide qui ont le droit à la justice.
Contact presse :
Marine Calmet 06.89.42.03.99
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